Hebdo – 2017, N°39 (Rain Man, Au service secret de sa majesté…)


Image d’en-tête : Rain Man

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Lundi : L’année sainte 

(Jean Girault, 1976)

« Jean Gabin »*

Voilà, c’est le dernier film de Gabin, qui lui permet de finir sa carrière dans la tradition de ses rôles de caïds qui ont le plus marqué. C’est un bon scénario pour chapeauter la carrière de l’acteur, qui mourra six mois après la sortie du film. Un scénario plutôt moral, comme le démontre avant tout la fin, dont l’humour laisse de plus en plus pressentir le style français des années 1980.

Bien que son rôle dans L’année sainte corresponde à ce qu’il a le plus fait, cet aspect un peu visionnaire – quoique également dirigé par l’ancienne génération avec Jean Girault aux manettes, qui lui survivra six ans – complète aussi sa carrière dans le sens il a toujours incarné les préoccupations françaises – d’où sa baisse en popularité juste après la guerre, où il reflétait combien le pays boudait le cinéma.

Côté dialogues, il y a Jacques Vilfrid, lui aussi plus qu’expérimenté, dont on ne pourra s’empêcher de remarquer les quelques lignes flottantes au milieu du reste, comme des bouche-trous sans trous.


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Mardi : Rain Man 

(Barry Levinson, 1988)

« Dustin Hofman »*

Rain Man ou le succès sorti de nulle part, moulé dans un matériau cent fois torturé. Les deux stars elles-mêmes doutaient de son potentiel, au point que Hoffman a presque quitté le projet après deux semaines de tournage, déçu de sa propre performance. Comme quoi l’artiste ne peut jamais être sûr de la qualité de son travail. Il a même fallu plus d’une semaine pour que les spectateurs se convainquent d’aller le voir, le haussant tardivement à la première place du box-office temporaire, puis de l’année 1988.

Comme à son habitude, Hoffman est un réalisateur officieux, puisque malgré ses hésitations initiales, c’est à lui qu’on doit son personnage d’autiste savant. Sans son opinion et ses improvisations, Raymond Babbit (le personnage en question) aurait été tout autre. L’acteur aurait même dû tourner le rôle du frère s’il n’en avait pas décidé autrement.

La raison superficielle pour laquelle ce film est légendaire, c’est la performance de Hoffman. Mais plus que cela, c’est sans doute la répartition des tâches au sein de la régie : Levinson réalisateur technique, Hoffman réalisateur méthodique du détail, Cruise réalisateur de l’antagonisme, Hans Zimmer réalisateur de l’ambiance (déjà, même pour sa première collaboration avec Hollywood).

On n’en voudra pas à Levinson d’avoir pris le temps de faire Good Morning Vietnam avant d’accepter le script de Rain Man, parce que les deux sont excellents. La maturation laborieuse et très lente du projet a débouché sur une histoire de la communication entièrement empathique qui peut relier deux personnes et que l’autisme peut clairement mettre en évidence, dont il n’y a à regretter que l’égoïsme très fort et réaliste dont fait preuve le personnage de Cruise, fatiguant quand cela dure deux heures.

Mais le résultat tape de toute manière au bon endroit dans des proportions qui dépassent le seul repère du public : quatre Oscars, deux Golden Globes et des tas de nominations, un score mérité pour cette grande collaboration de grands noms.


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Mercredi : Au service secret de sa majesté

(Peter R. Hunt, 1969)

« Autour de James Bond »*

La seule interprétation de Bond par George Lazenby, qu’il a immortalisée par sa turbulence, reflet par la même de ses qualités. Sa durée (cent trente minutes) nous en dit déjà long sur l’ambition du réalisateur, qui se met parfaitement dans la lignée de ses prédécesseurs tout en restant à l’avant-garde technique, d’une manière toutefois qui trahit le progressisme artistique. Les gagdets sont mis de côté – non sans une délicate apparition du très culte Desmond Llewelyn qui les fournit à Bond dans dix-huit de ses films – et cèdent leur place à des activités diverses et impressionnantes : ski, bobsleigh, course automobile, entre autres scènes physiques et d’action.

Pour la mise en oeuvre de ce contenu épique, Peter R. Hunt a fait avec le tout-venant, ce qui va avec beaucoup d’avantages… et beaucoup d’inconvénients. C’est sans doute le film de Bond où l’acteur principal joue le moins son propre rôle, tant il est doublé par des sportifs et des cascadeurs. Mais l’illusion est convaincante.

Le montage est de type mosaïque : les scènes sont composées d’une multitude de prises de vue qui durent parfois moins d’une demi-seconde. Très fatigant à la longue, quoique très bien réglé. Mais là aussi, l’innovation et la réussite ne vont pas sans leur corollaire : attendez-vous à un film tellement truffé de faux raccords qu’il pourrait servir de démonstration à ceux qui ne les remarquent d’ordinaire pas.



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Vendredi : The Million Dollar Hotel

(Wim Wenders, 2000)

« Wim Wenders »*

Après avoir discrètement collaboré avec U2 pour la musique de ses films, Wenders a décidé de donner à Bono beaucoup plus de liberté dans la création cinématographique. Résultat : The Million Dollar Hotel, sa coécriture et sa bande originale parfaite – mais on n’en attendait pas moins, forcément. L’histoire toutefois est entièrement wenderesque ; à croirait qu’à vouloir ouvrir la porte à d’autres, il s’en est lui-même ouvert plusieurs. Il est d’ailleurs allé un peu loin, faisant du film une oeuvre trop personnelle pour le style vaguement tous publics auquel il nous avait habitué les années d’avant. C’est de là que vient la réputation très mauvaise du film, mais cela aurait pu être tellement pire qu’il est difficile de justifier totalement la huée qu’il a connue, ou d’expliquer le désaveu par Mel Gibson de sa performance pourtant honorable au regard de l’environnement artistique déjà encombré avec lequel in a dû composer. Il est exagéré de dénigrer Wenders pour avoir fait de l’art un peu trop pur ; on a vu bien pire. Il faut simplement convenir qu’allier l’art au désagréable n’est pas la meilleure recette.




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